[Déclaration de plusieurs éditeurs populaires en Grèce suite aux décès survenus à la banque Marfin lors de la récente grève générale du 5 mars.]
En décembre 2008, lors des événements qui ont suivi l'assassinat d'Alexandros Grigoropoulos, le mouvement anarchiste/anti-autoritaire a répondu aux appels fascistes des médias pour un retour à « calme, ordre et sécurité » avec le slogan désarmant : « vous parlez de devantures de magasins, nous parlons de vies humaines ».
Quelle hypocrisie dangereuse fait que certains parlent désormais des extincteurs inexistants de la banque plutôt que des vies perdues ? Quelle tournure orwellienne de la réalité fait que certains parlent de l’événement tragique comme s’il s’agissait d’un court-circuit ?
Ne comprend-on pas vraiment que cette hypocrisie est à la hauteur de celle des meurtriers de l'OTAN qui parlaient de "dommage collatéral"?
Ne comprenons-nous pas vraiment que le cynisme et la brutalité évidents et reconnus d'un méga-capitaliste, qui a fait chanter ses employés pour qu'ils soient à la banque, ne rachètent personne pour les morts ?
Ne comprenons-nous pas vraiment que si vous utilisez les tactiques de la bête contre laquelle vous vous battez, vous ne faites plus qu'un avec elle ?
Si les anarchistes luttent pour quelque chose, s’il y a quelque chose pour lequel les gens doivent lutter, c’est bien la vie, la liberté et la dignité. Pour un monde où la mort n’aura plus aucune autorité…
Lors de la manifestation du 6 mai dans le centre de Thessalonique, en réponse à l'appel du syndicat des travailleurs hospitaliers de Thessalonique et des syndicats de base, de nombreuses personnes – pour la plupart des anarchistes et des anti-autoritaires du dernier bloc de la manifestation – ont crié à plusieurs reprises : : "C'étaient des meurtres, nous ne nous faisons pas d'illusions, l'État et Vgenopoulos assassinent les travailleurs". De telles pensées seront sûrement apaisantes pour beaucoup. Mais comprennent-ils vraiment le contenu et l’extension de ce qu’ils souhaitent ?
Nous ne savons pas exactement ce qui s'est passé à la banque Marfin dans l'après-midi du 5/5/2010. Ce que nous savons, c'est qu'au moment où nous avons appris la tragique nouvelle, personne dans notre entourage n'était en mesure de rejeter catégoriquement que c'était ce que les avocats des médias corporatifs avaient déclaré. Et cela aussi est tragique.
Parce que si, par notre pratique, nous ne rendons pas évidemment impossible (pour nous, en premier lieu) qu'un tel acte vienne de personnes actives dans le même espace politique que nous, alors nous avons déjà ouvert la voie à des tragédies (depuis irresponsabilité meurtrière, méchanceté ou malice déformée).
Dans une révolte généralisée, il y a des morts incontrôlables ; c'est arrivé à Los Angeles, c'est arrivé en Argentine. Personne n’a jamais songé à imputer ces morts à un courant politique organisé.
Le fait que les trois employés assassinés de la banque Marfin soient accusés d'anarchie révèle certainement d'énormes responsabilités. Qui peut ignorer la tolérance envers les logiques avant-gardistes et le mépris de la vie humaine ? Peu importe si vous dites que les anarchistes expérimentés, toutes ces années, ont incendié tant de banques et qu’aucune n’a jamais été mise en danger. Peu importe si vous dites que c'est la faute de Vgenopoulos car il a forcé les employés à rester dans la banque, qui n'avait aucune protection contre les incendies, etc.
Vous ne pouvez pas vous débarrasser de cette responsabilité.
S’il existe ne serait-ce que quelques personnes qui se définissent comme anarchistes et en arrivent au point d’irresponsabilité en incendiant des bâtiments avec des personnes à l’intérieur, cette irresponsabilité a en quelque sorte été cultivée.
Si, pire encore, vous avez ouvert la voie au plus grand acte d’agents provocateurs en Grèce depuis la Seconde Guerre mondiale, alors les conséquences à long terme dépassent même la tragédie des trois personnes assassinées.
Et la réponse n'est pas celle-là "l'ennemi de l'impitoyable". Nous connaissons à la fois la Piazza Fontana à Milan et la Scala à Barcelone.
La réponse est l’opposition émergente et dense qui s’enracine dans les espaces sociaux, à travers le pays – avec persévérance et un travail acharné ; avec camaraderie, mutualité et solidarité. La réponse est la lutte pour la vie, pas pour la mort.
Publications/journal Panopticon, Publications des étrangers, Publications Stasei Ekpiptontes, Exarchia Press, Black Peper of the Evian Gulf, Nyktegersia Annual Magazine
ZNetwork est financé uniquement grâce à la générosité de ses lecteurs.
Faire un don